À Toronto, comme dans de nombreuses villes du monde, les fausses nouvelles circulent rapidement, en particulier sur les réseaux sociaux. Des rumeurs ont par exemple circulé pendant la pandémie de COVID-19 prétendant que certains quartiers comme Etobicoke ou Scarborough allaient faire l’objet de confinements militaires, ou encore que boire de l’eau chaude toutes les dix minutes pouvait neutraliser le virus. Ces informations, fausses et dangereuses, ont eu des effets réels sur les comportements, alimentant l’anxiété ou détournant les gens des vraies recommandations sanitaires. Ce phénomène n’est pas marginal : il est structurel, mondial et touche toutes les générations. D’où l’importance, aujourd’hui, d’apprendre à vérifier l’information, à repérer les fausses nouvelles et à les déjouer efficacement.
1. Comprendre ce qu’est une fausse nouvelle
Une fausse nouvelle ou “infox” désigne une information mensongère, déformée ou manipulée, partagée massivement sur Internet, les réseaux sociaux ou par d’autres moyens de communication. Toutes les fausses nouvelles ne se ressemblent pas. Elles prennent différentes formes :
- La désinformation : une fausse information diffusée intentionnellement pour tromper.
- La mésinformation : une information incorrecte partagée sans intention de nuire.
- Les contenus satiriques pris au sérieux : comme ceux publiés sur le site Le Revoir ou The Beaverton, qui exagèrent volontairement des faits dans un but humoristique, mais que certains lecteurs interprètent au premier degré.
- Les images ou vidéos sorties de leur contexte.
2. Pourquoi tombons-nous dans le piège ?
Il est facile de se faire piéger, car les fausses nouvelles jouent souvent sur nos émotions, nos valeurs ou notre méfiance envers certaines institutions.
- L’effet de confirmation : on a tendance à croire ce qui conforte nos opinions.
- Le manque de temps : sur les réseaux sociaux, on lit vite, on réagit vite. Un titre sensationnaliste, une image choquante, et on partage sans prendre la peine de lire ou de vérifier.
- La pression sociale : lorsqu’une information est partagée par beaucoup de personnes, y compris par des amis ou des membres de la famille, on peut être tenté de la croire sans esprit critique.
- La puissance des algorithmes : les plateformes comme Facebook, Instagram ou TikTok nous montrent surtout ce qu’on a déjà aimé. Cela crée des “bulles” où l’on est exposé à une version très partielle du monde.
3. Comment vérifier l’information : les bons réflexes
Avant de partager une information, quelques gestes simples peuvent vous éviter de propager une fausse nouvelle.
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4. Les outils pour détecter les fausses nouvelles
Heureusement, plusieurs plateformes sont spécialisées dans la vérification de l’information. En voici quelques-unes à consulter régulièrement :
- Factuel de l’AFP (https://factuel.afp.com) : ce site analyse chaque jour des dizaines de rumeurs et les démonte avec des preuves.
- Détecteur de rumeurs de Science Presse (https://www.sciencepresse.qc.ca/detecteur-rumeurs) : un outil québécois très utile, notamment pour vérifier les nouvelles qui circulent en français au Canada.
- Les Décodeurs du Monde (https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/) : ils proposent des “vérifications express”, des “vrai ou faux” et des fiches pour comprendre les manipulations de l’information.
- Le site du gouvernement canadien sur la désinformation (https://www.canada.ca/fr/campagne/desinformation-enligne.html) : très utile pour comprendre les mécanismes de manipulation pendant les campagnes électorales, par exemple.
- Tineye.com ou Google Images : pour vérifier si une photo est ancienne ou a déjà été utilisée ailleurs.

5. Exemples concrets à Toronto
À Toronto, plusieurs cas de désinformation ont récemment retenu l’attention :
- En 2021, un faux avis partagé sur WhatsApp prétendait que l’accès au métro TTC serait restreint aux personnes vaccinées seulement, ce qui a semé la panique dans certains quartiers.
- En période électorale, des messages circulent souvent pour décourager certains groupes de voter, en prétendant que leur carte n’est plus valide ou que les bureaux seront fermés. Ces informations sont fausses, mais peuvent réduire la participation électorale, notamment chez les jeunes ou les personnes issues de l’immigration.
Tous ces exemples montrent que même dans une ville comme Toronto, réputée pour sa diversité et son ouverture, la désinformation peut circuler rapidement et créer de la méfiance, voire des tensions.
6. Développer l’esprit critique : une compétence citoyenne
La meilleure arme contre la désinformation reste l’esprit critique. Il ne s’agit pas de douter de tout, mais de toujours poser les bonnes questions :
- Qui parle ? Quelle est la source ?
- Que cherche-t-on à me faire croire ou ressentir ?
- Est-ce que d’autres médias sérieux en parlent ?
- Quelle est ma propre réaction émotionnelle ? Suis-je en colère, choqué ? Cela peut indiquer une tentative de manipulation.
Dans les écoles, de plus en plus de programmes de littératie médiatique sont mis en place. Mais cette éducation devrait se faire tout au long de la vie, notamment via les bibliothèques, et les organismes communautaires.
7. Le rôle des médias communautaires
Les médias communautaires jouent un rôle crucial dans la diffusion d’une information locale, fiable et adaptée au public. À CHOQFM 105.1, nous avons une mission d’éducation populaire : sensibiliser les francophones du Grand Toronto à l’importance de bien s’informer.
8. L’avenir : intelligence artificielle et nouveaux défis
Avec l’arrivée de l’intelligence artificielle, la création de fausses nouvelles devient encore plus sophistiquée. Des voix synthétiques, des deepfakes vidéo, des robots capables d’écrire des textes crédibles. Ces technologies représentent un défi immense.
Des outils comme ChatGPT, utilisés de façon responsable, peuvent au contraire aider à vérifier des faits ou à mieux comprendre un sujet. Mais mal utilisés, ils peuvent également produire des textes faux, biaisés ou manipulateurs.
C’est pourquoi il faut renforcer la vigilance, exiger plus de transparence des plateformes et développer collectivement une culture de la vérification. L’information est un bien public : nous devons tous contribuer à la protéger.
Dans un monde où l’information circule plus vite que jamais, savoir vérifier, douter, chercher la source et comprendre les intentions derrière un message est un acte de citoyenneté. C’est aussi une forme de résistance face aux manipulations, à l’ignorance et aux divisions. À CHOQ FM, nous croyons que la francophonie torontoise mérite une information de qualité, vérifiée, locale et engageante. En développant nos réflexes, en éduquant nos enfants, en partageant les bons outils, nous contribuons tous à une société plus juste, mieux informée et plus unie.
Par Kendra Oulai